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Interactions sous vibration : effets du dispositif d'entrée de données sur la saisie de valeurs numériques dans le cockpit

Charles-Antoine Lanoix

Mémoire de maîtrise (2023)

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Résumé

Depuis une vingtaine d’années, les écrans tactiles ont progressivement remplacé les contrôles mécaniques traditionnels : pensons aux téléphones cellulaires, aux systèmes de divertissement dans les voitures, même aux réfrigérateurs. L’industrie de l’aviation n’échappe pas à cette tendance, alors que les constructeurs cherchent à remplacer les boutons physiques utilisés traditionnellement par des écrans tactiles dans le but de réduire le poids des avions et d’économiser de l’espace dans le cockpit. Comme dans toute conception d’une interface humain-machine, l’analyse du contexte d’utilisation est primordiale. En aviation, une des contraintes principales de l’environnement est la présence de vibration sous forme de turbulences, ce qui peut affecter la performance des pilotes lors de leurs interactions avec le système. Pour que la transition vers les écrans tactiles se fasse sans heurts, il est donc nécessaire d’effectuer une comparaison approfondie entre les dispositifs mécaniques et l’écran tactile dans un environnement vibrant pour en garantir la sécurité ainsi que la performance. Il existe plusieurs études comparatives qui explorent le sujet. Cependant, ces expériences sont pour la plupart abstraites, hors du contexte spécifique de l’avion. Les résultats qui y sont recensés forment une base de connaissances, mais ne représentent pas parfaitement les tâches que les pilotes devront effectuer. Dans cette étude, nous avons comparé la performance de sept dispositifs d’interaction : trois dispositifs mécaniques (joystick, bouton rotatif fixé à l’écran, bouton rotatif sur un piédestal) et quatre dispositifs sur un écran tactile (clavier numérique sur l’écran de vol, clavier numérique sur un panneau latéral, manipulations directes de l’écran de vol, bouton glissoir). 20 participants ont réalisé des tâches d’entrée de données numériques pour un système d’autopilote, p. ex. changement de vitesse ou d’altitude, avec trois amplitudes de changements : petite, moyenne ou grande. En parallèle, les participants ont réalisé une tâche de suivi de cible en manipulant un joystick. Tout au long de l’expérience, les participants étaient assis sur un siège reproduisant la vibration vécue dans un hélicoptère à vitesse de croisière. Plusieurs variables ont été mesurées durant l’expérience, notamment le temps de complétion des tâches, le nombre d’erreurs, la performance de la tâche de suivi ainsi que le suivi du regard des participants. De plus, ces derniers ont rempli des questionnaires permettant d’évaluer la charge mentale, l’inconfort et l’utilisabilité de chaque dispositif. Nos résultats montrent que le dispositif le plus rapide pour la saisie de données dépend de l’ampleur du changement: si l’écart entre la valeur cible de la tâche et la valeur initiale est petit (10 incréments ou moins), les boutons rotatifs ont permis une entrée de données environ 23% plus rapide que les claviers numériques au second rang (p < .05). Au-delà de ce seuil, le temps de complétion des boutons rotatifs augmente jusqu’à devenir environ 50% plus lent que celui des claviers numériques (p < .01). En général, les mécanismes de confirmation qui ont été mis en place pour chaque dispositif ont mené à des taux d’erreurs bas (moins de 0,2 erreurs par tâche) et nous n’avons pas observé de différences significatives entre les dispositifs. Les difficultés que les participants ont rencontrées avec le dispositif de manipulation directe à l’écran tactile ont mené à la charge mentale la plus élevée (score NASA-TLX moyen de 50,72), alors que le bouton rotatif fixé à l’écran a créé l’inconfort le plus intense parmi tous les dispositifs (score Borg CR-10 de 1,27). Il a aussi été possible d’établir une corrélation (p < .001) entre la vitesse de complétion des tâches et l’utilisabilité: les dispositifs les plus rapides, comme les claviers numériques, ont obtenu les meilleurs scores d’utilisabilité de la part des participants. Somme toute, nous avons pu nuancer les conclusions des études précédentes qui soulignaient que les claviers numériques étaient invariablement plus rapides que les boutons rotatifs pour l’entrée de données. Nous avons également montré que les bonnes pratiques de conception, comme l’utilisation d’un mécanisme de confirmation, permettent de mitiger le manque de précision inhérent aux écran tactiles largement document dans la littérature et de produire une interface rapide, utilisable et sécuritaire.

Abstract

Over the past two decades, touch screens have gradually replaced traditional mechanical controls: think of cell phones, car entertainment systems, even refrigerators. The aviation industry is no exception to this trend, as manufacturers seek to replace traditionally used physical buttons with touchscreens in an effort to reduce aircraft weight and save cockpit space. As with any human-machine interface design, analysis of the context of use is paramount. In aviation, one of the main constraints of the environment is the presence of vibration in the form of turbulence, which can affect the performance of pilots during their interactions with the system. Therefore, to ensure a smooth transition to touchscreens, a thorough comparison between mechanical devices and touchscreen in a vibrating environment is necessary to ensure safety as well as performance. There are several comparative studies that explore this topic. However, these experiments are mostly abstract, outside the specific context of the aircraft. The results that are reported form a knowledge base, but do not perfectly represent the tasks that pilots will have to perform. In this study, we compared the performance of seven interaction devices: three mechanical devices (joystick, rotary knob attached to the screen, rotary knob on a pedestal) and four touchscreen devices (keypad on the primary flight display, keypad on a side panel, direct manipulations of the primary flight display, slider). 20 participants performed digital data entry tasks for an autopilot system, e.g., speed or altitude change, with three magnitudes of change: small, medium, or large. In parallel, participants performed a target tracking task by manipulating a joystick. Throughout the experiment, participants were seated in a seat reproducing the vibration experienced in a helicopter at cruising speed. Several variables were measured during the experiment, including task completion time, number of errors, tracking task performance, and eye tracking. In addition, participants completed questionnaires to assess the mental load, discomfort and usability of each device. Our results show that the fastest device for data entry depended on the magnitude of the change: if the difference between the task target value and the initial value was small (10 increments or less), rotary knobs provided approximately 23% faster data entry than numeric keypads in the second rank (p < .05). Above this threshold, the completion time of rotary buttons increased until it became about 50% slower than that of numeric keypads (p < .01). In general, the confirmation mechanisms that were implemented for each device led to low error rates (less than 0.2 errors per task) and we did not observe significant differences between devices. The difficulties participants experienced with the direct touchscreen manipulation device led to the highest mental load (mean NASA-TLX score of 50.72), while the rotary knob attached to the screen created the most intense discomfort among all devices (Borg CR-10 score of 1.27). It was also possible to establish a correlation (p < .001) between task completion speed and usability: the fastest devices, such as numeric keyboards, received the highest usability scores from participants. All in all, we were able to qualify the findings of previous studies that emphasized that numeric keyboards were consistently faster than rotary knobs for data entry. We have also shown that good design practices, such as the use of a confirmation mechanism, can mitigate the lack of precision inherent in touch screens widely documented in the literature and produce a fast, usable, and safe interface.

Département: Département de mathématiques et de génie industriel
Programme: Maitrise recherche en génie industriel
Directeurs ou directrices: Philippe Doyon-Poulin
URL de PolyPublie: https://publications.polymtl.ca/53410/
Université/École: Polytechnique Montréal
Date du dépôt: 04 oct. 2023 14:35
Dernière modification: 10 oct. 2024 11:57
Citer en APA 7: Lanoix, C.-A. (2023). Interactions sous vibration : effets du dispositif d'entrée de données sur la saisie de valeurs numériques dans le cockpit [Mémoire de maîtrise, Polytechnique Montréal]. PolyPublie. https://publications.polymtl.ca/53410/

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