<  Retour au portail Polytechnique Montréal

Dépolymérisation du polystyrène par pyrolyse micro-onde

Philippe Leclerc

Thèse de doctorat (2018)

Document en libre accès dans PolyPublie
[img]
Affichage préliminaire
Libre accès au plein texte de ce document
Conditions d'utilisation: Tous droits réservés
Télécharger (4MB)
Afficher le résumé
Cacher le résumé

Résumé

Cette thèse présente le développement de nouveaux outils ainsi que de nouvelles connaissances fondamentales sur le recyclage du polystyrène par pyrolyse microonde, sans toutefois se limiter exclusivement à ce matériau. Tout d'abord, la cinétique de la dépolymérisation du polystyrène par pyrolyse microonde est étudiée. Pour ce faire, un analyseur thermogravimétrique microonde suivant les recommandations du Kinetics Committee of the International Confederation for Thermal Analysis and Calorimetry (ICTAC) sur la collecte des données est développé. Cet appareil permet de mesurer la masse et la température d'un échantillon durant sa pyrolyse microonde. L'utilisation d'une microcellule de charge permet une analyse précise de la masse avec des valeurs aussi petites que 0.3 g et une erreur inférieure à 5 %. Pour ce qui est de la température, il est nécessaire d'utiliser un appareil de mesure adéquat pour un environnement microonde. C'est pourquoi un thermomètre muni d'une thermopile infrarouge a été conçu sur mesure. Afin de mesurer la température de la réaction elle-même et non la température du réacteur et de son environnement, deux filtres optiques sont ajoutés à la thermopile. L'isothermicité du milieu réactionnel est atteinte avec une masse de récepteurs microondes (carbure de silicium) de 3 g et le taux de chauffe est contrôlé en ajustant manuellement la puissance des microondes. Une fois calibrées, la microcellule de charge et la thermopile infrarouge permettent de collecter des données de qualité nécessaires au développement cinétique de la pyrolyse microonde. Ces caractéristiques font de cet analyseur thermogravimétrique microonde le plus précis et le plus fiable disponible dans la littérature. Bien qu'utilisé dans cette thèse pour l'étude cinétique de la pyrolyse microonde du polystyrène, cet appareil peut être utilisé pour n'importe quel type de matériau. Ensuite, c'est avec ce nouvel analyseur que les paramètres cinétiques (énergie d'activation, E, facteur préexponentiel, ln(A), et modèle de réaction, f(α)) sont déterminés en suivant, cette fois-ci, les recommandations de l'ICTAC sur l'analyse des données thermogravimétriques. Premièrement, des expériences utilisant trois taux de chauffe linéaires différents sont réalisées : 24.5, 38.5 et 49.5 °C min-1. Deuxièmement, afin d'estimer ces paramètres, une méthode de model-fitting est appliquée sur les données expérimentales pour des conversions entre 0.05 et 0.95. Différents modèles de réactions sont comparés et le choix du modèle se fait en fonction de deux tests statistiques : le coefficient de détermination (R2) et la somme des carrés des résidus (RSS). Appliqués aux données expérimentales et aux données prédites, ces tests ont permis d'estimer que l'énergie d'activation de la décomposition du polystyrène par pyrolyse microonde E est de 45 kJ mol-1, que le facteur préexponentiel ln(A) est de 3.6 et que le modèle de réaction est un random scission représenté par la fonction f(α) = 2(α1/2-α). Des analyses conjointes de thermogravimétrie conventionnelle montrent que le modèle de réaction de la pyrolyse conventionnelle du polystyrène est le même que pour la pyrolyse microonde. C'est son énergie d'activation qui est différente : 4.5 fois plus élevée. Cette différence majeure soulève plusieurs questionnements, notamment quant à l'impact réel des microondes sur la pyrolyse. Pour y répondre, les propriétés diélectriques (constante diélectrique, ε', facteur de pertes diélectriques, ε'', et facteur de dissipation, tan δ) du polystyrène et de ses produits durant la pyrolyse sont mesurées en fonction de la température. La première hypothèse est de dire que les intermédiaires de polystyrène, et/ou ses produits, formés durant la pyrolyse réagissent avec les microondes et participent à la réaction de dépolymérisation. Malgré certaines tendances observées dans les résultats, les petites valeurs ainsi que les faibles variations dans les propriétés diélectriques ne peuvent justifier la diminution marquée de l'énergie d'activation de la pyrolyse microonde. La deuxième hypothèse est de dire que la température locale de la réaction n'est pas celle mesurée durant les expériences thermogravimétriques, mais qu'elle est en réalité beaucoup plus élevée. En fixant le ratio E/T dans la loi d'Arrhénius et en considérant l'énergie d'activation de la pyrolyse conventionnelle comme étant la seule et unique, des températures de réaction atteignant les 3000 °C sont possibles. Ce sont des expériences menées dans l'unité de pyrolyse microonde industrielle de Pyrowave inc. qui ont permis de confirmer cette hypothèse. La réponse réside dans l'observation suivante : des expériences de pyrolyse microonde opérant à un certain ratio de puissance microonde sur surface de récepteur microonde donnent des résultats identiques à des expériences de pyrolyse conventionnelle, et ce, pour une température de réaction de 100 °C inférieure. L'explication la plus plausible est que les deux réactions se produisent à la même température. Un simple bilan d'énergie sur une particule de récepteur montre que sa température de surface peut être très différente de celle du volume réactionnel. Le polystyrène fondu entourant les particules de récepteur agit comme un isolant thermique, mais pas diélectrique. Cela veut dire que les microondes traversent le polystyrène et se rendent aux récepteurs sans toutefois que l'énergie absorbée par ces derniers ne puisse s'en échapper. La conséquence directe de cette isolation est une augmentation de la température des particules de récepteur microonde et, par le fait même, de la vitesse de réaction. En effet, selon le ratio de puissance microonde sur surface de récepteur, elle peut augmenter jusqu'à 10 ordres de grandeur. Les analyses thermogravimétriques, le développement cinétique et les expériences industrielles prouvent ainsi que l'effet des microondes sur la pyrolyse du polystyrène est exclusivement thermique et non athermique. Finalement, une réalité industrielle touchant directement la pyrolyse microonde du polystyrène est traitée : la présence de contaminants dans les flux de déchets, plus particulièrement le papier. Pour en étudier son comportement, de la fibre de cellulose est utilisée comme modèle. Bien que la pyrolyse microonde puisse être effectuée avec une certaine quantité de contaminants dans le flux de polystyrène, la quantité et la qualité des produits sont affectées. Afin de quantifier ces derniers, des copyrolyses de polystyrène et de cellulose sont effectuées avec des ratios massiques de polystyrène : cellulose allant de 100 : 0 à 50 : 50. Les résultats montrent une synergie considérable entre les deux matières premières. D'abord, il y a une importante diminution dans la quantité des huiles produites, passant d'une fraction massique de 58.9 % pour la pyrolyse du polystyrène seul à 30.2 % pour une copyrolyse avec un ratio de 50 : 50. Ensuite, la présence de cellulose a un impact direct sur la composition des huiles, notamment au niveau du styrène, le produit d'intérêt dans la pyrolyse microonde du polystyrène, et de l'éthylbenzène, un sous-produit de la pyrolyse. La fraction massique de styrène dans les huiles passe de 60.3 % pour la pyrolyse du polystyrène seul à 43.1 % pour une copyrolyse avec un ratio de 50 : 50, alors que celle de l'éthylbenzène passe de 0.32 % à 7.25 % dans les mêmes conditions. L'apport d'hydrogène par la pyrolyse de la cellulose favorise l'hydrogénation du styrène en éthylbenzène et est le principal responsable de ce changement dans la composition des huiles. Finalement, l'augmentation ou la diminution dans la production de certains dimères et trimères de styrène, tels que le 1-Phenyltetralin, le 1,4-Diphenyl-2-butene et le 1,3-Diphenyl-1-butene, montre qu'il y a une compétition pour l'utilisation du styrène hydrogéné.

Abstract

This thesis aims to develop new tools and fundamental knowledge on polystyrene microwave pyrolysis, without being limited to this material. Polystyrene depolymerization kinetics by microwave pyrolysis was studied using a microwave thermogravimetric analyzer that was developed following recommendations based on thermal data collection from the Kinetics Committee of the International Confederation for Thermal Analysis and Calorimetry (ICTAC). A micro load cell measured small masses (0.3 g) with excellent precision (<5 %), while for temperature measurements, a thermometer appropriate for a microwave environment and made from an infrared thermopile, was designed and built. To measure the reaction temperature and not the reactor wall temperature and its environment, two optical filters were added to the device. The isothermicity of the reaction was achieved with a mass of 3 g of microwave receptors (silicon carbide) and the heating rate was controlled by manually adjusting the microwave power. Once calibrated, the micro load cell and the infrared thermopile were able to collect quality data for polystyrene microwave pyrolysis kinetics development. The above characteristics make the microwave thermogravimetric analyzer the most precise and reliable analyzer of its kind in the literature. Applied to polystyrene in this thesis, it can be used with any pyrolysable material. Using this new analyzer, kinetics parameters (activation energy, E, pre-exponential factor, ln(A), and reaction model, f(α)) were determined following the ICTAC recommendations on thermal data analysis. First of all, experiments using three different linear heating rates were carried out: 24.5, 38.5 et 49.5 °C min-1. Secondly, to estimate the kinetics parameters, a model fitting method was applied to the experimental data over conversions of 0.05 to 0.95. Many reaction models were compared and two statistical tests were used to determine the correct one: the coefficient of determination (R2) and the residual sum of squares (RSS). Applied to the experimental and predicted data, the tests made it possible to estimate an activation energy E of 45 kJ mol-1, a pre-exponential factor ln(A) of 3.6 and a random scission reaction model with the function f(α) = 2(α1/2-α). When compared to conventional pyrolysis, they both had the same reaction model, but their activation energies were quite different: 45 kJ mol-1 for microwave pyrolysis and 200 kJ mol-1 for conventional pyrolysis. The difference was major and raised many questions, mainly on the real impact of microwaves on pyrolysis. To answer the above questions, polystyrene dielectric properties (dielectric constant, ε', dielectric loss factor, ε'', and dielectric loss tangent, tan δ) were measured over the pyrolysis temperatures. In the first hypothesis, polystyrene intermediates and/or its products formed during pyrolysis interacted with microwaves and participated in the reaction. The small values of their dielectric properties, however, could not justify the decrease in activation energy between microwave and conventional pyrolysis. Based on the second hypothesis, the reaction temperature was not the same as the one measured during the experiments, but was actually much higher. By fixing the E/T ratio in the Arrhenius equation and considering that the only real activation energy was the conventional one, temperatures as high as 3000 °C could be reached. Experiments carried out on the industrial microwave pyrolysis unit of Pyrowave Inc. confirmed this hypothesis. The key observation was the following: under certain conditions of microwave power and receptor area, microwave pyrolysis results were the same as those from conventional pyrolysis, although at a reaction temperature 100 °C lower. This could only be the result of identical reaction temperatures. A simple energy balance on a microwave receptor particle showed that its surface temperature could be very different from the bulk temperature. Being a good thermal insulator, but a bad dielectric material, melted polystyrene around the receptor particle let the microwaves pass through, but did not allow the energy to escape. The consequence was an increase in the reaction temperature and, as a result, an increase of the reaction rate. Depending on the pyrolysis conditions, the reaction rate could increase up to 10 orders of magnitude. The thermogravimetric analysis, the kinetics development and the industrial experiments proved that the effects of microwaves on polystyrene pyrolysis were exclusively thermal and not athermal. In conclusion, a current issue for industries concerning polystyrene microwave pyrolysis was studied: the presence of contaminants in the waste stream, more specifically of paper. Cellulose fiber was chosen as a model material. Even though microwave pyrolysis can support some contaminants in the feed, the quantity and the quality of its products may be affected. To quantify it, polystyrene and cellulose copyrolysis was performed with mass ratios of polystyrene : cellulose going from 100 : 0 to 50 : 50. Results showed a synergy between the two materials. First of all, a significant reduction in oil production passing from a mass fraction of 58.9 % when polystyrene was pyrolysed alone to 30.2 % for a 50 : 50 copyrolysis. Secondly, cellulose had a direct impact on the quality of the oil by changing its composition, mainly styrene and ethylbenzene. The mass fraction of styrene in the oil decreased from 60.3 % for polystyrene pyrolysis alone to 43.1 % for a 50 : 50 copyrolysis, while ethylbenzene increased from 0.32 % to 7.25 % under the same conditions. The hydrogen coming from the cellulose pyrolysis was responsible for the hydrogenation of styrene into ethylbenzene. Finally, the increase or decrease in certain dimer and trimer productions, like 1-Phenyltetralin, 1,4-Diphenyl-2-butene and 1,3-Diphenyl-1-butene, demonstrated that there was some competition for the hydrogenated styrene.

Département: Département de génie chimique
Programme: Génie chimique
Directeurs ou directrices: Jamal Chaouki et Jocelyn Doucet
URL de PolyPublie: https://publications.polymtl.ca/2982/
Université/École: École Polytechnique de Montréal
Date du dépôt: 02 mai 2018 15:56
Dernière modification: 06 avr. 2024 03:56
Citer en APA 7: Leclerc, P. (2018). Dépolymérisation du polystyrène par pyrolyse micro-onde [Thèse de doctorat, École Polytechnique de Montréal]. PolyPublie. https://publications.polymtl.ca/2982/

Statistiques

Total des téléchargements à partir de PolyPublie

Téléchargements par année

Provenance des téléchargements

Actions réservées au personnel

Afficher document Afficher document