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Identification des sites de prélèvement d'eau souterraine en situation de filtration sur berge par un cadre géochimique et isotopique

Laurence Labelle

Mémoire de maîtrise (2022)

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Résumé

La filtration sur berge (FSB) est une méthode de pré potabilisation de l'eau de surface. Elle consiste à installer un système de prélèvement d'eau souterraine à proximité d'une eau de surface, dans des formations géologiques perméables. L'eau captée par le pompage sera constituée d'un mélange d'eau souterraine et d'eau de surface récemment infiltrée. Les systèmes de FSB sont utilisés avec succès depuis plusieurs décennies dans des sites où les besoins en eau potable excèdent le rendement potentiel des aquifères, et où la charge de contaminants dans les eaux de surface est considérée comme trop élevée pour un prélèvement direct. Le passage de l'eau dans les berges a comme bénéfice d'atténuer les contaminants initialement présents dans l'eau de surface, tout en permettant le prélèvement d'un grand volume d'eau. Par contre, cette réduction des contaminants est particulièrement sensible au taux de mélange entre l'eau de surface et l'eau souterraine et au temps de séjour de l'eau de surface dans les berges. Tout changement dans les conditions hydrodynamiques, que ce soit une augmentation du niveau de l'eau de surface ou du débit de pompage au puits, aura un effet sur ces paramètres. Il importe donc de bien identifier les sites qui font de la FSB, pour permettre un suivi de leur vulnérabilité. L'enjeu est que de nombreux sites de prélèvement d'eau souterraine sont en situation de FSB de façon non intentionnelle, c'est-à-dire qu'ils prélèvent une eau de surface infiltrée sans prise en compte de la vulnérabilité spécifique liée à ces systèmes. L'objectif principal de ce projet est de développer une approche basée sur des traceurs environnementaux, présents naturellement dans l'eau, pour identifier à grande échelle les sites qui sont en situation de FSB. La conductivité électrique (CE) et les isotopes stables de la molécule de l'eau (δ2H et δ18O) ont été choisis comme traceurs pour leur stabilité (long temps de conservation, conditions d'entreposage à température pièce), leur faible coût analytique ainsi que pour la simplicité des protocoles d'échantillonnage. Les résultats de cette étude permettront non seulement d'obtenir de l'information utile pour les décideurs au Québec, mais aussi de développer une méthodologie exportable dans d'autres contextes à l'international. Pour ce faire, 40 sites de prélèvements municipaux ont été échantillonnés à l'eau brute de façon hebdomadaire à mensuel pendant 18 mois. Les 40 sites ont été choisis pour pouvoir représenter une gamme la plus large possible de caractéristiques hydrogéomorphologiques (distance à l'eau de surface, profondeur de la crépine, type d'aquifère…). Dans le cadre de ce projet pilote, les opérateurs des installations ont été mobilisés pour collecter eux-mêmes les échantillons, qui étaient ensuite envoyés pour être analysés en laboratoire pour δ2H, δ18O et pour la CE. L'hypothèse de base était que ces traceurs présentent une variation saisonnière dans les eaux de surface, tout en étant stables dans l'eau souterraine. Un signal variable dans le temps, retrouvé à l'eau pompée d'une installation de prélèvement, signifierait donc que le signal de l'eau de surface s'est propagé dans les berges jusqu'au puits. Pour bien caractériser la variation saisonnière de l'eau de surface, quatre rivières ayant des régimes hydriques distincts ont été échantillonnées au même pas de temps que les installations de prélèvement. Les 40 sites ont été classés en fonction de la variabilité saisonnière du signal dans l'eau des puits. Les séries temporelles de 19 installations de prélèvement n'ont pas présenté de variation saisonnière. Les sites ont donc été classés dans le Groupe 1 : Non-FSB et ont été considérés comme pompant uniquement une eau souterraine. Pour 5 installations de prélèvement, les séries temporelles ont présenté une forte variation saisonnière, visible à tout moment de l'année. Les sites sont considérés comme pompant une forte proportion d'eau de surface infiltrée et ont été classés dans le Groupe 2 : FSB continue. Pour 4 sites, le signal variait à certains moments seulement dans l'année, ce qui signifie que l'apport d'eau de surface n'était effectif à l'eau pompée qu'occasionnellement. Ces sites ont été classés dans le Groupe 3 : FSB occasionnelle, et considérés comme pompant une eau de surface infiltrée uniquement lorsque certaines conditions hydrodynamiques sont respectées. Pour représenter rapidement les sites en situation de FSB, l'écart-type sur les séries temporelles du δ2H et de la CE a été calculé. Un écart-type plus élevé que l'incertitude analytique des traceurs est le signe potentiel d'une variation due à la propagation du signal de l'eau de surface et non au bruit analytique. Les limites sur les écarts-types, posés à 25 μS/cm pour la CE et 1 ‰ pour le δ2H, permettent d'identifier facilement sur un abaque à quel groupe (Non-FSB, FSB continue ou FSB saisonnière) appartient à chaque site. Pour identifier correctement les moments dans l'année où l'eau de surface s'infiltre jusqu'au puits de pompage, l'échantillonnage doit être effectué au minimum une fois par mois pendant 12 mois consécutifs. Les données des séries temporelles étaient ainsi incomplètes pour 12 installations. La vulnérabilité à la contamination microbienne des neuf sites classés en situation de FSB a ensuite été discutée en comparant les épisodes de contamination à la bactérie Escherichia coli (E. coli), communément utilisée comme indicateur de contamination fécale, à l'eau brute des sites. Parmi ces sites, six ne présentaient aucune contamination au E. coli (<0 UFC/100 mL) pendant la durée de l'étude. Cela a permis de constater que même si une connexion hydraulique entre l'eau de surface et le puits est synonyme de FSB, elle n'est pas automatiquement associée à une contamination microbiologique. Finalement, une caractérisation hydrogéomorphologique simplifiée de l'ensemble des 40 sites a été effectuée à partir des rapports hydrogéologiques fournis par les partenaires ainsi que des données provenant du Ministère de l'Environnent et de la Lutte contre les changements climatiques (MELCC). Cette caractérisation a permis une première identification des liens entre certains critères (distance à l'eau de surface, profondeur de la crépine et type d'aquifère au droit du puits) et la classification des sites en trois groupes.

Abstract

Riverbank filtration (RBF) is a method of pre-purification of surface water. It consists of installing a groundwater withdrawal system near-surface water, in a permeable geological formation. The water captured by the pumping well consists of a mixture of groundwater and recently infiltrated surface water. RBF systems have been used for several decades in sites where drinking water requirements exceed the potential yield of aquifers, and where the load of contaminants in surface water is considered too high for direct removal. The passage of water through the banks has the advantage of mitigating the contaminants initially present in the surface water, while allowing the withdrawal of a large volume of water as compared to groundwater sources that do not benefit from such infiltration from nearby rivers or lakes. On the other hand, the reduction in contaminants is particularly sensitive to the rate of mixing between surface water and groundwater and the residence time of surface water in the banks. Any changes in hydrodynamic conditions, whether an increase in surface water level or pumping flow at the well, will have an effect on these parameters. It is therefore important to identify the sites that are in RBF situation, to adequately characterize their vulnerability. The challenge is that a lot of groundwater withdrawal sites are in a situation of RBF unintentionally, as they abstract infiltrated surface water without taking into account the specific vulnerability related to these systems. The main objective of this project is to develop an approach based on environmental tracers, naturally present in the water, to identify on a regional scale the sites that are in the situation of RBF. The electrical conductivity (EC) and stable isotopes of the water molecule (δ2H) were chosen as tracers for their stability (long shelf life, storage conditions at room temperature), low analytical cost and for the simplicity of sampling protocols. The results of this study will not only provide useful information for decision-makers in Quebec, but also develop a methodology that can be exported to other international contexts. To do this, 40 municipal sampling sites were sampled on a weekly to monthly basis for 18 months. The 40 sites were chosen to represent the widest possible range of hydrogeomorphological characteristics (distance to surface water, depth of the strainer, type of aquifer, etc.). As part of this pilot project, facility operators were mobilized to collect the samples themselves, which were then sent for laboratory analysis for δ2H and for the EC. The hypothesis was that these tracers exhibit seasonal variation in surface water, while being stable in groundwater. A time-varying signal, found in the water pumped from a sampling facility, would therefore mean that the surface water signal has propagated through the banks to the well. To properly characterize the seasonal variation in surface water, four rivers with distinct water regimes were sampled at the same time step as the sampling facilities. The 40 sites were classified according to the seasonal variability of the signal in the well water. The time series for 19 sampling facilities showed no seasonal variation. The sites were therefore classified in Group 1: Non-RBF and were considered pumping only groundwater. For 5 sampling facilities, the time series showed a strong seasonal variation, detected at any time of the year. The sites are considered to pump a high proportion of infiltrated surface water and have been classified in Group 2: Permanent-RBF. For 4 sites, the signal varied at only certain times in the year, meaning that the surface water supply was only visible to the pumped water occasionally. These sites have been classified in Group 3: Occasional-RBF, and considered pumping infiltrated surface water only when certain hydrodynamic conditions are met. To quickly represent the sites in RBF situation, the standard deviation on the time series of the δ2H and the EC was calculated. A standard deviation higher than the analytical uncertainty of the tracers is a potential sign of a variation due to the propagation of the surface water signal and not to analytical noise. The standard deviation limits, set at 25 μS/cm for the EC and 1 ‰ for the δ2H, make it easy to identify on an abacus which groups (Non-RBF, Permanent-RBF or Occasional-RBF) each site belongs to. To correctly identify the times in the year when surface water infiltrates to the pumping well, sampling should be carried out at least once a month for 12 consecutive months. As a result, time series data were incomplete for 12 facilities. The vulnerability to microbial contamination of the nine sites classified as RBF was then discussed by comparing episodes of Escherichia coli contamination to the raw water of the sites. Of these sites, 6 showed no sign of E. coli contamination for the duration of the study. While a hydraulic connection between surface water and the well is synonymous with RBF, it is not automatically synonymous with microbiological contamination. Finally, a simplified hydrogeomorphological characterization of all 40 sites was carried out using hydrogeological reports provided by the partners as well as data from the Ministère de l'Environnent et de la Lutte contre les changements climatiques (MELCC). This characterization allowed an initial identification of the links between certain criteria (distance to surface water, depth of the strainer and type of aquifer) and the classification of sites into three groups.

Département: Département des génies civil, géologique et des mines
Programme: Génie minéral
Directeurs ou directrices: Paul Baudron, Florent Barbecot et Françoise Bichai
URL de PolyPublie: https://publications.polymtl.ca/10539/
Université/École: Polytechnique Montréal
Date du dépôt: 06 févr. 2023 14:37
Dernière modification: 30 sept. 2024 07:38
Citer en APA 7: Labelle, L. (2022). Identification des sites de prélèvement d'eau souterraine en situation de filtration sur berge par un cadre géochimique et isotopique [Mémoire de maîtrise, Polytechnique Montréal]. PolyPublie. https://publications.polymtl.ca/10539/

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