Mémoire de maîtrise (2011)
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Résumé
Les sols sont des ressources naturelles essentielles au cycle de la vie. Leur dégradation est donc problématique puisque la perte de leur qualité d'origine peut avoir des impacts néfastes, comme la dégradation des services rendus par les écosystèmes pour promouvoir la santé humaine. Une des causes contribuant à la dégradation rapide des sols est l'émission de polluants dans l'environnement. Malgré la mise en place de politiques de réhabilitation des sites contaminés fixant des seuils réglementaires en fonction des usages des sols, la complexité dans la composition des sols induit qu'il est difficile d'estimer si, suite à une remédiation, le sol retrouve ses fonctionnalités d'origine et si toute toxicité due à la présence des contaminants est éliminée pour les écosystèmes et les humains. Cette difficulté est principalement rencontrée, lorsque les contaminants sont sous forme de mélanges complexes et/ou des composés persistants dans les sols. Bien que la littérature regorge d'études sur le développement d'indices d'évaluation de la qualité des sols, la détermination d'un indice utilisant des indicateurs biologiques et mesurant à la fois de manière qualitative et quantitative les effets toxiques des contaminants dans les sols relève encore du défi. Pour être pertinent, un tel indice de qualité doit être sensible aux différents niveaux de contaminations, être adapté à tout type de contaminations, même les plus complexes, et être applicable à tout type de sols. Pour évaluer l'effet des contaminants dans les sols, il est proposé de mesurer la stabilité des fonctions enzymatiques dans un sol, via l'indice de stabilité relative du sol (RSSI : « Relative Soil Stability Index »). Le calcul de cet indice se base sur la réponse dynamique d'enzymes extracellulaires, impliquées dans les réactions qui se produisent au sein des cycles biogéochimiques (C, N, P, S) régulant le cycle de la vie, face à une perturbation thermique, sur une période de temps donnée. Néanmoins, cet indice présente des lacunes dont 1) l'éventuelle stimulation ou inhibition de l'activité enzymatique par la présence de contaminants dans le sol qui n'est pas prise en compte dans le calcul; et 2) la comparaison entre les valeurs de RSSI qui est difficile à faire sans la présence d'une référence. Ce projet de maîtrise se propose de pallier ces lacunes en adaptant l'outil de mesure de la stabilité enzymatique à tout contexte de contamination. L'indice qui en découle a été renommé: le RSSIr (« Relative Soil Stability Index using a Reference soil »). L'hypothèse de recherche sur laquelle se base le projet est la suivante : L'évaluation quantitative de la stabilité relative du sol via le RSSIr permet de détecter l'impact d'une contamination complexe aux hydrocarbures sur la qualité des sols en distinguant différents niveaux de concentrations, et cela quel que soit le type de sol. Deux objectifs ont été ciblés : 1) Tester l'outil RSSIr et vérifier sa capacité à évaluer la qualité de sols de différents types et niveaux de contamination complexe; et 2) Vérifier l'utilisation de l'outil RSSIr dans le cadre d'un cas réel, pour évaluer la qualité de sols ayant subi des traitements biologiques de remédiation suite à une contamination. La contamination choisie pour ces expériences consistait en des mélanges complexes d'hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP), composés organiques persistants et difficilement dégradables. Dans un premier temps, trois sols de textures différentes (loam argilo-sableux, sol argileux, loam sableux) ont été contaminés artificiellement. Chaque type de sol a donné lieu à cinq échantillons de différents niveaux de contamination (0; 0,17; 1,70; 24 et 60 mL créosote.kg-1 de sol sec), nommés C0, C1, C2, C3 et C4, correspondant théoriquement à des concentrations en HAP respectives de 0, 87, 870, 12 432 et 31 173 mg total HAP.kg-1 de sol sec. Dans un second temps, des sols contaminés principalement par des HAP ont été prélevés le long d'une chaîne de traitements biologiques (avant traitement, après co-compostage, pendant le traitement de phytoremédiation). Un échantillon témoin a également été prélevé. Pour répondre aux deux objectifs, le schéma expérimental appliqué était semblable. Une perturbation thermique ponctuelle (60°C, 24 heures) a été appliquée aux échantillons de sols. L'impact de cette perturbation a été suivi sur les potentiels d'activités de trois enzymes (protéase, uréase, arylsulfatase) sur une période de 12 jours, puis quantifié par le calcul de valeurs RSSI et RSSIr. Le calcul d'une valeur RSSI se base sur la comparaison du travail qu'une enzyme produit dans un sol contaminé à la suite d'une perturbation avec le travail qu'elle accomplit dans le même sol contaminé mais non perturbé. Quant au RSSIr, la référence du sol est modifiée : le calcul d'une valeur RSSIr se base sur la comparaison du travail qu'une enzyme accomplit dans un sol contaminé à la suite d'une perturbation avec le travail qu'elle produit dans le même sol non contaminé et non perturbé (sol de référence). Des analyses statistiques ont été utilisées pour interpréter les résultats. Avec les sols contaminés artificiellement, contrairement à l'outil RSSI, le RSSIr montre des résultats intéressants : calculé à partir du suivi des potentiels de la protéase et de l'uréase, il permet de différencier les sols contaminés par des niveaux faibles de ceux contaminés par des niveaux élevés de créosote. La protéase est l'enzyme qui présente la plus grande stabilité dans les sols faiblement contaminés (indices calculés supérieurs à 100 %). Dans les sols hautement contaminés, la stabilité de cette enzyme est inhibée, en particulier dans le sol argileux (indices calculés de 7,3 ±8,3 % dans le sol contaminé C3 contre 184,3 ±17,2 % dans le sol non contaminé C0). Quant aux valeurs de RSSIr mesurées avec l'uréase, dans les sols faiblement contaminés, celles-ci ne dépassent pas le seuil de 53,7 ±5,9 % (valeur enregistrée pour le loam argilo-sableux contaminé C2), l'activité de l'uréase étant inhibée par la chaleur thermique appliquée. Globalement, il est observé que les mesures de stabilités basées sur les activités de la protéase et l'uréase décroissent avec l'augmentation du niveau de contamination. Toutefois, ces tendances varient différemment dans les trois sols testés, confirmant ainsi que l'effet toxique des HAP change avec la composition du sol et notamment avec le contenu en matière organique (MO) ou en argile. Dans les sols de terrain, les concentrations mesurées confirment le rendement des traitements : des diminutions de 91 ±4 % du contenu en HAP, suite au traitement de co-compostage et de 89 ±3 % du contenu en C10-C50 entre le traitement de co-compostage et le traitement pendant phytoremédiation sont observées. Les valeurs de RSSIr, calculées à partir du suivi des potentiels de la protéase et de l'arylsulfatase, sont sensibles aux niveaux de contamination et aux traitements de bioremédiation appliqués Les outils mesurant les stabilités enzymatiques dans les sols après traitements (co-compostage et phytoremédiation) présentent des valeurs largement supérieures à 100 % pour les mesures de RSSIr et légèrement inférieures à ce seuil pour les mesures de RSSI. Ces mesures de stabilité reflètent ainsi une nette amélioration de la stabilité fonctionnelle après les traitements. Cependant, les valeurs de stabilité du sol de référence peuvent atteindre des valeurs largement inférieures à celles calculées pour des sols contaminés : par exemple pour l'arylsulfatase un RSSIr de 25,4 ±2,7 % dans le sol témoin (non contaminé) et un RSSIr de 48,7 ±10,5 % dans le sol contaminé avant traitement sont calculés. Ainsi les résultats obtenus introduisent l'importance à accorder dans le choix du sol de référence. En effet, l'application de traitements biologiques participe aux changements de la structure et de la composition des sols et rend ainsi discutable le choix du sol de référence, ainsi que la méthode de mesure de la stabilité enzymatique dans un sol. Finalement, le projet a permis de conclure tant sur les capacités de l'outil RSSIr à être un bon indice de qualité que sur ses perspectives d'outil écotoxicologique pour mesurer les effets toxiques des HAP sur les microorganismes. Pour faire suite à ce projet, le développement de la méthodologie peut se poursuivre dans les axes d'améliorations suivants : optimisation dans l'établissement des courbes dose-réponse, investigation sur les facteurs de variation de l'outil (en particulier ceux de la composition des sols), de l'âge de la contamination, ainsi que du type de contaminants.
Abstract
Soils are natural and essential resources for the life cycle. Their degradation is therefore problematic, as a loss in their original quality can have negative impacts such as the degradation of ecosystem services to promote human health. The emission of pollutants in the environment represents one of the causes for rapid soil degradation. Despite established regulations for contaminated sites rehabilitation which define contaminant limits based on soil use, the complex nature of soils leads to difficulty in judging whether a soil recovers to its initial functionality after remediation, and whether the contaminant toxicity is suppressed for the ecosystems and humans. This difficulty is mostly found for contaminations by complex mixtures and/or persistent chemical compounds in soils. While literature is overwhelmed with studies on the development of indices for soil quality evaluation, determining an index using biological indicators and measuring the toxic effects of contaminants in soils both quantitatively and qualitatively still remains a challenge. To be relevant, such a quality index has to be sensitive to various contamination levels, be adaptable to any contamination context -even the most complex ones-, and be applicable to any type of soil. To evaluate the effect of contaminants in soils, this project proposes to measure soil enzymatic functions using the Relative Soil Stability Index (RSSI). In order to calculate this index, the dynamic response of extracellular enzymes, involved in reactions occurring in the biogeochemical cycles (C, N, P, and S), regulating the life cycle is monitored over a period of time when submitted to a thermal perturbation. Nevertheless, this index bears some deficiencies: 1) eventual stimulation or inhibition of enzyme activity due to the presence of contaminants in soil is not taken into account in the calculations, and 2) without a reference, the comparison between RSSI-values is difficult. This master's thesis proposes to overcome the deficiencies mentioned above by adapting the tool for measuring enzymatic stability to any contamination context. The resulting index is renamed “Relative Soil Stability Index using a Reference soil” (RSSIr). The research hypothesis of this project is the quantitative evaluation of relative soil stability using RSSIr, which allows for the detection of the impact of complex-hydrocarbon contamination on soil quality by discriminating different concentrations levels, regardless of soil type. Two main objectives are addressed: 1) testing the RSSIr tool and verifying its ability to measure the quality of different soil types and complex contamination scenarios; and 2) implementing the RSSIr tool in real scenarios for evaluating the quality of soil bioremediation. The selected site for these experiments is contaminated by PAH (polycyclic aromatic hydrocarbon) mixtures which are persistent organic compounds and difficult to degrade. Firstly, three soils of various grain size mixtures (sandy clay loam, clay, sandy loam) were artificially contaminated. Each soil type lead to five samples with different contamination levels (0; 0.17; 1.70; 24 and 60 mL creosote. dry soil kg-1), named C0, C1, C2, C3 and C4, respectively, corresponding to theoretically respective PAH concentrations of 0, 87, 870, 12 432 and 31 173 mg total PAH. dry soil kg-1. Secondly, contaminated soil samples, (mostly by PAH) were collected at various points along the biological treatment process (prior to treatment, after co-composting, during phytoremediation), along with a control soil sample. For both types of soil samples the experimental process was similar. A thermal perturbation (60°C, 24 hours) was applied to the soil samples. The impact of this perturbation was then monitored throughout a 12-day period by measuring the potential activity of three enzymes (protease, urease, arylsulfatase), and subsequently quantified by calculating RSSI and RSSIr values. The calculation of a RSSI value is based on the comparison made between enzyme activity in a contaminated soil following perturbation, and enzyme activity in the same contaminated soil, but not perturbed. As for the RSSIr tool, the reference soil is modified: the calculation of a RSSIr value is based on the comparison between the enzyme activity in a contaminated soil following a perturbation and the enzyme activity in the same uncontaminated and non-perturbed soil (the reference soil). Statistical analyses were used to examine the results. With artificially contaminated soils, the RSSIr shows more interesting results compared to the RSSI tool: calculated from the protease and urease potential monitoring, the RSSIr allows for discriminating between low and high creosote contaminated soils. Protease shows the best stability in the low contaminated soils (stability index values higher than 100 %). In highly contaminated soils, the stability of this enzyme is inhibited, particularly in clay (values of 7,3 ±8,3 % in the contaminated C3 soil sample versus 184,3 ±17,2 % in the non-contaminated C0 soil sample). As for the RSSIr values measured with urease, in low contaminated soils values do not exceed the threshold of 53,7 ±5,9 % (value obtained for the contaminated C2 sandy clay loam); urease activity is inhibited by the applied thermal stress. Overall stability values based on protease and urease decrease when contamination levels increase. These trends however vary in the three soils that were tested; this confirms that the toxic effects of PAHs change with soil composition, and specifically with varying organic matter or clay content. In the site soil samples, the measured concentrations confirmed the efficiency of treatment: a decrease in PAH concentrations, up to 91 ±4 % after co-composting treatment, and decrease of C10-C50 concentration of up to 89 ±3 % between co-composting and phytoremediation treatments. RSSIr values were sensitive to contamination levels and to applied bioremediation treatments, calculated from the monitoring of protease and arylsulfatase potentials. Like the previous study, tools measuring enzymatic stabilities in soils after treatment (co-composting and phytoremediation) present values noticeably greater than 100 % when calculated with the RSSIr, and slightly lower than this threshold when calculated with the RSSI. These stability measurements therefore reflect a clear enhancement of functional stability after treatment. Moreover, stability values of the reference soil reach values significantly lower than those calculated for contaminated soils. For example, using arylsulfatase, an RSSIr value of 25,4 ±2,7 % was obtained in the control soil sample (non-contaminated) and a RSSIr value of 48,7 ±10,5 % was calculated for the contaminated soil sample. Consequently, the results showed the importance of reference soil choice. Biological treatment applications can lead to changes in soil structure and composition, making the choice of the reference soil, and the method to measure the enzymatic stability in a soil, rather arguable. Finally, the project allows concluding on both the abilities of the RSSIr tool to be a good quality index and its perspectives as an ecotoxicological tool to evaluate the toxic effect of PAHs on microorganisms. Following this project, the index development method may be improved: notably, optimization in the establishment of dose-response curves, investigation on the factors of the tool variations (especially parameters from soil composition), on the contamination age and also contamination type.
Département: | Département de génie chimique |
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Programme: | Génie chimique |
Directeurs ou directrices: | Louise Deschênes |
URL de PolyPublie: | https://publications.polymtl.ca/571/ |
Université/École: | École Polytechnique de Montréal |
Date du dépôt: | 16 août 2011 15:46 |
Dernière modification: | 30 sept. 2024 18:44 |
Citer en APA 7: | Demuysère, R. (2011). Développement d'un indice mesurant la stabilité enzymatique relative des sols pour évaluer l'impact d'une contamination organique complexe sur la qualité de sols dans un contexte de remédiation [Mémoire de maîtrise, École Polytechnique de Montréal]. PolyPublie. https://publications.polymtl.ca/571/ |
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