Mémoire de maîtrise (2020)
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Résumé
Depuis la réalisation d'un camouflage optique en 2006, le concept de masquer la présence d'un objet au regard d'une certaine grandeur physique s'est répandu dans tous les domaines de la physique. De nombreuses équipes se sont alors donné pour objectif de faire en sorte qu'un trou dans un milieu 2D ne soit pas détectable en mesurant un champ physique donné loin de celui-ci. La majorité de ces camouflages se sont appuyés sur des matériaux entièrement structurés par l'homme afin de présenter des propriétés inobservées dans la nature, appelés "métamatériaux". Bien que de nombreux camouflages physiques aient été réalisés grâce à ceux-ci, à ce jour aucun d'entre eux ne peut dissimuler un objet à la fois d'un écoulement (i.e. en pression et en vitesse) et de transport chimique ou thermique (i.e. en concentration ou température). Cela serait pourtant très utile en génie biomédical, et plus particulièrement dans le domaine des biocapteurs, où des surfaces sensibles sont placées dans un écoulement microfluidique incident chargé en espèces chimiques, incluant des parasites. Un problème récurrent des biocapteurs est l'adsorption non spécifique de ces parasites dans les liaisons entre éléments biologiques et surfaces physiques, qui réduit la spécificité, la sensibilité et la reproductibilité des mesures. Un camouflage microfluidique d'écoulement et de transport permettrait de protéger les surfaces sensibles de ce phénomène, tout en éliminant l'influence croisée que les surfaces voisines ont les unes sur les autres dans les études multiplexées. Le travail présenté ici consiste à concevoir un tel dispositif de camouflage microfluidique. Dans le cadre des biocapteurs, il faut que le camouflage puisse être interrompu au moment oppor-tun, qui correspond typiquement au ratio maximal entre les concentrations d'analytes et de parasites, puis réactivé après mesures. Même si au prix d'une grande complexité structurelle certains métamatériaux disposent de propriétés physiques modifiables, la zone camouflée reste quant à elle figée. Par conséquent, on doit trouver une stratégie de dissimulation n'impliquant pas de métamatériaux solides. On choisit ici de se baser sur une réinterprétation microflui-dique du "paradoxe de d'Alembert", inspirée par des analogies fortes avec les camouflages optiques. Tout d'abord, un cadre théorique est donné à cette stratégie impliquant des obstacles flui-diques appelés "corps de Rankine". On justifie puis développe des modèles d'écoulements potentiels pour décrire leur contour. On trouve alors que le système est théoriquement apte à camoufler un obstacle en termes de champ de vitesses. Ensuite, on prend en compte les e˙ets visqueux pour trouver la relation entre la taille de l'obstacle et la chute de pression dans le système, qui s'avère être d'ordre 2 et permet donc un camouflage en pression eÿcace pour des obstacles suÿsamment petits. Une fois le camouflage caractérisé mécaniquement, on propose un modèle analytique pour les échanges d'espèces et de chaleur s'y produisant. Cependant, ce modèle ne permet pas de conclure sur le camouflage en concentration ou en température loin en aval. Pour faire un pas vers le dimensionnement expérimental du camouflage, on passe à l'outil numérique en réalisant des simulations par éléments finis. Celles-ci révèlent l'influence qu'ont les di˙érents paramètres du système sur l'allure du camouflage, et donnent une première idée de la contrôlabilité du système. Certains résultats numériques permettent alors de condition-ner le camouflage chimique au caractère convectif de l'écoulement, associé à un haut nombre de Péclet. Une fois combinées à la théorie, ces simulations produisent un jeu de paramètres permettant l'implémentation expérimentale d'un dispositif de camouflage. Plusieurs designs sont alors fabriqués et testés, jusqu'à parvenir à une version stable et eÿcace réalisée par impression 3D. L'écoulement et le transport dans ce dispositif sont alors évalués expérimentalement et com-parés aux résultats théoriques, qui sont en très bon accord. Plus précisément, on montre que l'on dispose d'un contrôle précis sur la forme de l'interface du camouflage ainsi que sur les échanges chimiques ou thermiques y ayant lieu. On prouve aussi que le camouflage peut être modifié, activé ou désactivé en quelques dizaines de secondes. On démontre ensuite qu'il peut servir de filtre en géométrie "ouverte", et obéit aux mêmes lois d'échelles que les autres filtres microfluidiques classiques. Pour finir, on valide que ce camouflage peut e˙ectivement protéger une surface de l'adsorption d'une espèce indésirable dans un écoulement pendant de longues périodes de temps. Un tel camouflage microfluidique peut donc fortement contribuer au génie biomédical en rendant les biocapteurs moins vulnérables à l'adsorption non spécifique, mais dépasse aussi ce cadre puisqu'il peut fonctionner avec n'importe quelle surface sensible, comme un tapis cellulaire ou des tranches de tissu. De plus, ce dispositif constitue un apport intéressant au secteur de la microfluidique "ouverte", dont il est à ce jour le seul filtre connu. Enfin, il présente un fort attrait en physique de par sa contribution au domaine florissant des camouflages, en proposant une stratégie inédite de dissimulation pour les grandeurs d'écoulement et de transport.
Abstract
Since the realization of an optical cloak in 2006, the idea of hiding the presence of an object with respect to a certain physical measure has spread to every field of physics. Many have tried before to make a hole in a 2D medium that could not be detected by measuring a given physical field afar. Most of these cloaks relied on materials entirely man-made to exhibit properties not observed in nature, called "metamaterials". Although many physical cloaks have been obtained using such materials, to date none of them can conceal an object from both flow (i.e. pressure and velocity) and chemical or thermal transport (i.e. concentration or temperature). However, this would be very useful in biomedical engineering, especially in the field of biosensors, where sensitive surfaces are placed within an incident microfluidic flow loaded with chemical species, including parasites. A recurring biosensors problem is the non-specific adsorption of these parasites in the bonds between biological elements and the physical surface, which reduces the specificity, sensitivity and reproducibility of the measurements. A microfluidic flow and transport cloak would protect sensitive surfaces from this phenomenon, while eliminating the cross-influence that neighboring surfaces have on each other in multiplexed studies. The work presented here consists in designing such a microfluidic cloaking device. In the context of biosensors, the cloak must be able to be deactivated at the appropriate time, which typically corresponds to the maximum ratio between analyte and parasite concentrations, and then reactivated after measurements. Even if at the cost of high structural complexity some metamaterials have modifiable physical properties, the concealed area remains fixed. Therefore, a cloaking strategy that does not involve solid metamaterials must be found. We choose here to rely on a microfluidic reinterpretation of the "d'Alembert's paradox", inspired by strong analogies with optical cloaking. First of all, a theoretical framework is given to this strategy involving fluidic obstacles called "Rankine bodies". We justify the use and develop potential flow models to describe their contours. It is then found that the system is theoretically capable of cloaking an obstacle in terms of velocity field. Then, the viscous e˙ects are taken into account to find the relationship between the size of the obstacle and the pressure drop in the system, which turns out to be a second order power law and thus allows an e˙ective pressure cloak for suÿciently small impediments. Once the cloak is mechanically characterized, an analytical model is proposed to describe the species and heat exchanges occurring within it. However, this model does not allow a firm conclusion about concentration (or temperature) cloaking far downstream.To take a step towards realizing the cloak experimentally, we switch to the numerical tool by carrying out finite element simulations. These reveal the influence of the various system parameters on the cloak shape and give us a first glance at the controllability of the system. Some of these numerical results can be used to condition the chemical cloaking eÿciency to the convective aspect of the flow, associated with a high Péclet number. Once combined with the theory, these simulations produce a set of parameters allowing the experimental implementation of a cloaking device. Several designs are then manufactured and tested, until a stable and eÿcient version is produced by 3D printing. Flow and transport in this device are then experimentally investigated and compared to the theoretical results, which are in very good agreement. Specifically, it is shown that one has a precise control over the shape of the cloak interface as well as the chemical or thermal exchanges taking place in it. It is also shown that the cloak can be modified, activated or deactivated in a few tens of seconds. It is then demonstrated that it can be used as a filter in an "open-space" geometry and obeys the same scaling laws as other conventional microfluidic filters. Finally, we validate that this cloak can e˙ectively protect a surface adsorption in an undesirable species flow for long periods of time. Such microfluidic cloak can therefore make a significant contribution to biomedical engineer-ing by making biosensors less vulnerable to non-specific adsorption, but its applications also go beyond this field since the cloak can work with any sensitive surface, such as a cell layers or slices of tissue. Moreover, this device is an interesting contribution to the "open" microfluidics sector, of which it is to date the only known filter. Finally, it has a strong appeal in physics due to its contribution to the flourishing field of cloaking, by proposing a novel concealment strategy for flow and transport quantities.
Département: | Institut de génie biomédical |
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Programme: | Génie biomédical |
Directeurs ou directrices: | Thomas Gervais |
URL de PolyPublie: | https://publications.polymtl.ca/5370/ |
Université/École: | Polytechnique Montréal |
Date du dépôt: | 20 oct. 2020 13:47 |
Dernière modification: | 28 sept. 2024 17:24 |
Citer en APA 7: | Boyadjian, O. (2020). Conception d'un dispositif de camouflage microfluidique [Mémoire de maîtrise, Polytechnique Montréal]. PolyPublie. https://publications.polymtl.ca/5370/ |
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